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Témoignages

Les histoires réelles ont le pouvoir de toucher et d’inspirer. Dans cette section, nous partageons les témoignages de personnes dont la vie a été marquée par des défis liés à la santé masculine, que ce soit un diagnostic de cancer de la prostate ou des testicules, ou des difficultés avec la santé mentale. Vous découvrirez aussi des récits de ceux qui ont trouvé du soutien et des réponses grâce à nos campagnes de sensibilisation. Ensemble, ces voix illustrent l’importance de parler, de prévenir, et de soutenir. Leur courage est une source d'espoir et un rappel que personne n’est seul face à ces épreuves.

L'histoire de Baptiste

Bonjour Baptiste, merci de partager ton histoire avec nous. Peux-tu te présenter en quelques mots ?

 

Oui, avec plaisir ! Je suis un Lausannois de 25 ans qui vient de terminer ses études en psychologie. Plutôt casanier mais aussi sportif, j’aime bien faire des randonnées, du cardio et du fitness. J’ai plutôt un mode de vie sain, sans tabac ni drogues, mais je ne dis jamais non à un bon verre de vin partagé entre amis pour le plaisir de la convivialité.

 

Peux-tu nous raconter comment tu es tombé sur l’affiche de Medstache et ce qui t’a incité à pratiquer une autopalpation testiculaire ?

 

Je me rappelle très bien de ce moment. C’était un mardi soir, après une journée à l’uni. Je scrollais sur Instagram et l’un de mes potes avait partagé en story votre poste à propos de l’autopalpation. Au début je n’y ai pas prêté attention et continué à scroller. Mais j’avais un doute si j’avais bien vu des testicules en story car je trouvais ça surprenant. Donc je suis retourné voir et c’est là où j’ai lu le poste.

 

Que s’est-il passé après que tu ailles remarqué une anomalie ? Peux-tu nous parler de ton parcours médical ?

 

Pas évident de résumer tout ça sans dramatiser. De nature, je suis quelqu’un d’assez anxieux face aux problèmes de santé. Alors, quand j’ai senti cette masse dure, j’ai immédiatement paniqué. J’ai essayé de me rassurer, de rationaliser : "Avec toi, c’est toujours rien de grave, pas vrai ?" Mais cette nuit-là, j’ai très mal dormi. Impossible de ne pas y penser. Le lendemain, j’étais en cours, mais mon esprit n’y était pas. À force de ressasser, l’angoisse est devenue physique. La douleur, jusque-là discrète, a commencé à s’intensifier. Mon copain m’a poussé à consulter sans attendre afin que je sois rassuré.

 

À la permanence, c’est là où les angoisses se sont matérialisées : "Je ne peux pas vous rassurer. Il faudrait faire une imagerie dans les prochaines heures." À ce moment-là, j’ai su. Mon intuition me disait qu’il se passait quelque chose de grave. C’était un mercredi soir, en plein mois de novembre, seul dans les rues glaciales de Lausanne. Tout semblait dramatique ahah.

 

Le lendemain, l’ultrason a confirmé mes craintes. La médecin a lâché : "Il y a une anomalie cellulaire. Prenez rendez-vous chez un spécialiste rapidement." Là, tout s’est accéléré. C’est étrange de se dire que des mots aussi cliniques peuvent bouleverser une vie entière. En quelques secondes, j’ai compris : j’ai un cancer. Pas de détour, pas d’explication inutile. Juste un constat brut.

 

Le lendemain, vendredi, l’hôpital de Rennaz m’a appelé. "Pouvez-vous venir dans 1h30 ?" Panique totale. Je ne savais même pas quoi emporter, mais j’ai préparé un sac, presque mécaniquement, pour plusieurs jours. Ce n’est qu’à ce moment-là que j’ai prévenu mes parents. Jusqu’ici, je ne voulais pas les inquiéter inutilement. Mais maintenant, tout devenait trop réel.

 

À l’hôpital, tout s’enchaînait : tests, examens, discussions précipitées. En quelques heures, ils m’ont annoncé que je serai opéré dès le lundi suivant. Moins de cinq jours après avoir détecté l’anomalie. Et là, il a fallu décider en un temps record de choses qui pourraient marquer toute ma vie : ma fertilité, la possibilité d’avoir des enfants. C’était un tourbillon de questions, de doutes, et surtout de peur. Mais mes parents m’ont dit dès les premiers instant « cette épreuve, c’est ensemble. T’es pas seul ».

 

L’opération, une ablation, s’est bien déroulée. Mais j’étais terrifié, notamment à cause de ma phobie des aiguilles et des conséquences de cette intervention. Pendant l’anesthésie, mon corps a réagi avec des arythmies, ce qui m’a valu une nuit sous surveillance. Et comme si ça ne suffisait pas, quelques jours plus tard, ma peau s’est couverte d’une éruption allergique impressionnante. Personne ne comprenait vraiment pourquoi.

 

Une semaine plus tard, le diagnostic final est tombé : un séminome de stade 1, sans métastase. Une petite victoire dans cette bataille. Les médecins m’ont félicité pour ma réactivité. Ils m’ont expliqué que ce type de cancer est souvent détecté bien plus tard. Ce qui m’a sauvé, c’est une simple publication Instagram qui sensibilisait à l’importance de l’autopalpation. Un détail qui a changé ma vie. Prochain rendez-vous dans 6 mois pour un scanner de contrôle. Aurevoir.

 

Après cette première phase, j’ai tenté de reprendre une vie normale. Le sport, les études, ma routine. Mais quelques mois plus tard, la douleur est revenue, cette fois dans l’autre testicule. C’était comme un mauvais rêve qui recommençait. Les examens ont révélé des calcifications, signe qu’une nouvelle tumeur se formait. Cette fois, l’impact psychologique a été bien plus dur. La première opération avait été si rapide que je n’avais pas eu le temps de réaliser et de digérer. Là, je voyais tout arriver, lentement, inévitablement. L’opération, les journées allongées à ne rien faire, les douleurs, etc.

 

Ils ont d’abord tenté une ablation partielle pour préserver une partie de l’organe et éviter un traitement hormonal. Mais après la biopsie, le verdict est tombé : tout le testicule était atteint. Une troisième opération, une ablation complète, s’imposait. Tout était censé être rentré dans l’ordre. On ne s’attendait pas du tout à ce genre de nouvelles. C’est à ce moment que mes angoisses ont atteint leur pic. Pas tant pour l’intervention en elle-même car je savais ce qui allait se passer, mais pour tout ce qu’elle impliquait : les hormones, ma sexualité, ma santé à long terme. Ce que les médecins voulaient éviter arriva.

 

Heureusement, après cette dernière intervention, les choses ont commencé à se stabiliser. Aujourd’hui, je suis suivi par un endocrinologue et je passe régulièrement des examens de contrôle. Ces rendez-vous sont encore des épreuves, des moments où l’angoisse refait surface. Mais avec le temps, je m’habitue. J’avance, petit à petit, avec des cicatrices, certes, mais aussi avec une nouvelle perspective sur la vie.

 

 

Qu’est ce qui a traversé ton esprit quand on a prononcé pour la première fois le mot cancer ?

 

Il faut savoir que le mot "cancer" n’a été prononcé de façon concrète qu’après la première opération. Avant ça, les médecins restaient très prudents. Ils me disaient : "On ne peut pas vous dire ce que c’est pour le moment, pas sans biopsie. Mais il faut opérer rapidement." D’une certaine manière, c’était plus facile à entendre comme ça. Quand ils m’ont enfin dit ce que c’était, la tumeur n’était déjà plus là. C’était derrière moi. Sur ce point, je pense que les médecins ont vraiment bien géré.

 

Mais pour être honnête, les moments le plus difficiles, c’était juste après les ultrasons. Le premier quand la médecin m’a dit : "Il y a une anomalie cellulaire," j’ai tout de suite compris. Pas besoin de détails, pas besoin d’attendre. Ces mots ont suffi pour que je sache. Et le rendez-vous a été tellement rapide : moins de 10 minutes. À la fin, elle m’a juste demandé : "D’autres questions ? Non ? Très bien. Bonne soirée." Et voilà, je me suis retrouvé seul dans les rues de Lausanne.

 

Ce moment-là… je crois que c’est l’un des plus compliqués que j’ai vécus concernant cette histoire. J’ai des souvenirs flous. Je ne sais même plus comment je me suis retrouvé en train de pleurer dans une pharmacie. Ils refusaient de me donner les anxiolytiques qui m’avaient été prescrits. Je me sentais complètement démuni. Et puis, dans un mélange d'épuisement et de résignation, je me suis dit : "Foutu pour foutu, va te chercher une boisson bien trop sucrée et bien trop chère chez Starbucks." C’était absurde, mais c’était ma façon de tenir le coup à ce moment-là.

 

Et le deuxième ultrason quand on m’annonçait des calcifications de manière assez vague, sans vraiment m’expliquer ce que ça signifiait.

 

Comprendre par soi-même qu’on a un cancer, c’est une expérience que je ne souhaite à personne. C’est comme si ton corps te trahissait. Une sorte de déconnexion totale entre ton corps et ton esprit. À ce moment-là, tu ne réfléchis plus. Tu es juste en mode pilote automatique, à essayer de fonctionner malgré tout.

 

 

Quelle a été l’importance d’un diagnostic précoce dans ton parcours de soin ? 

 

Le fait d’avoir pu détecter cela rapidement, c’est une véritable chance. Je me dis souvent que ça m’a épargné beaucoup de souffrances, et peut-être même des conséquences bien plus graves. Rien qu’au niveau des métastases, j’ai évité un scénario bien plus sombre. Les médecins m’ont expliqué que ce type de cancer est généralement diagnostiqué à des stades plus avancés. Alors, quelque part, ma réactivité a été une bénédiction.

 

J’ai « simplement » dû subir des opérations pour retirer les parties malades. Bien sûr, ces interventions n’ont rien de simple. Ce sont des épreuves, autant pour le corps que pour l’esprit. Chaque fois, c’est une confrontation avec sa propre fragilité, avec des questions qui font peur. Mais en même temps, je réalise à quel point j’ai été chanceux. J’ai pu éviter les traitements lourds que l’on associe si souvent aux cancers : la chimiothérapie, la radiothérapie. Rien que pour ça, je me considère privilégié.

 

 

Qu’est ce qui t’as aidé à tenir pendant cette période difficile ? As-tu bénéficié d’un soutien particulier, que ce soit de tes proches, des professionnels de santé ou d’une association ?

 

Tout d’abord, j’ai mis mes frères au courant, car ils travaillent dans le domaine médical. Leur soutien a été immédiat, instinctif. Mes frères ont su trouver les bons mots et m’entourer dès le début, ce qui m’a donné une force incroyable. Ensuite, je me suis tourné vers mes parents, mais seulement quand j’ai compris que les choses étaient réellement « graves ». Je voulais les protéger, éviter de les inquiéter inutilement. Mais une fois qu’ils ont su, toute la famille s’est serrée les coudes. On a continué à se voir régulièrement, à partager des soupers, à maintenir cette normalité qui devenait tellement précieuse. Même quand j’avais des douleurs, que je devais rester allongé la plupart du temps, ils étaient là. Leur présence me rappelait que je n’étais pas seul dans cette épreuve.

 

Mon copain a été un pilier tout au long de cette épreuve. Dès le début, c’est lui qui m’a encouragé à consulter lorsque j’étais envahi par l’angoisse, et il n’a jamais cessé d’être présent. Il a été là dans les moments les plus difficiles, à me soutenir physiquement et moralement, que ce soit en m’accompagnant à des rendez-vous ou simplement en étant une présence rassurante à mes côtés. Il savait trouver les mots justes, mais parfois, son silence, juste sa main dans la mienne, suffisait à calmer mes tempêtes intérieures. Sa patience, son amour inébranlable, et sa manière de transformer des journées sombres en instants un peu plus légers m’ont permis de traverser ça plus facilement.

 

J’ai aussi reçu beaucoup d’aide pour mes cours. Je ne pouvais plus y assister pendant plusieurs semaines, et spontanément, des camarades m’ont écrit pour me proposer de prendre mes notes ou de m’envoyer ce dont j’avais besoin. Ce n’était peut-être qu’un détail à leurs yeux, mais pour moi, cela m’a enlevé un énorme poids. Quand on traverse une maladie comme le cancer, ces petits gestes, même « secondaires », font toute la différence.

 

Et bien sûr, mes amis. Ils m’écrivaient régulièrement, prenaient des nouvelles, me faisaient sentir qu’ils pensaient à moi. Ce réseau de proches a été essentiel. Si vous connaissez quelqu’un qui traverse une période difficile, je ne peux que vous encourager à lui écrire, même un simple message. On ne réalise pas à quel point quelques mots peuvent réchauffer un cœur. Un petit geste peut avoir un grand impact.

 

Quand tout cela a été derrière moi, je me suis accordé quelques séances de psychothérapie. C’était nécessaire pour digérer cette histoire, pour mettre des mots sur ce que j’avais vécu. C’est étrange à dire, mais ces moments m’ont permis de poser un regard plus apaisé sur tout cela, comme pour refermer doucement un chapitre.

 

 

Où en es-tu aujourd’hui, après ton traitement ? Comment te sens-tu physiquement et mentalement ?

Avoir un cancer, ça bouleverse profondément la manière dont on perçoit la vie. Ça oblige à réévaluer ses priorités et à donner de l’importance à des choses qu’on tenait pour acquises. J’ai appris à dire oui plus souvent, à saisir les opportunités qui se présentent, et surtout à essayer de vivre dans le moment présent. Mais ce n’est pas si simple. Mes angoisses par rapport à la santé ont également été renforcées après cette histoire. Je dois souvent être rassuré.

 

Être dans le moment présent après une telle épreuve, c’est un défi constant. J’ai tendance à ressasser le passé, à me rejouer encore et encore cette histoire dans ma tête, comme si je cherchais à l’intégrer pleinement. Quant au futur, il reste chargé d’incertitudes et d’angoisses. Les échéances des scanners et IRM de contrôle sont toujours là, comme des rappels que tout pourrait basculer à nouveau. Même si les risques diminuent avec le temps, la peur d’entendre de mauvaises nouvelles ne disparaît jamais complètement. Et c’est pour ça que j’essaie, malgré tout, d’ancrer mon esprit dans l’instant présent.

 

Physiquement, on pourrait dire que les choses se sont stabilisées. Les douleurs sporadiques s’estompent peu à peu, mais le suivi médical reste un rappel constant. Entre les consultations en endocrinologie et les injections régulières de testostérone, il y a des moments où mon énergie et mon humeur fluctuent, comme si mon corps fonctionnait au rythme d’un calendrier invisible. Mais avec le temps, j’apprends à accepter ces ajustements et à avancer avec.

 

Tu ne caches pas ton expérience à tes abonnées sur Instagram, as-tu ressenti un certain tabou lié au cancer testiculaire qui te pousse à vouloir partager ton parcours et sensibiliser d’autres à cette thématique ?

 

Au début, parler de mon cancer me mettait mal à l’aise. Que ce soit au niveau de la maladie en soit ou de l’organe concerné. J’avais peur du jugement, et l’idée d’aborder un sujet aussi personnel me gênait un peu. J’ai commencé par une story sur Instagram, uniquement visible pour mes "amis proches", pour les informer de ma situation. Je trouvais étrange d’envoyer des messages individuels en mode "salut, au fait, j’ai un cancer". Évidemment, mes meilleurs amis, je leur ai parlé directement. Mais partager cette nouvelle plus largement, même de manière discrète, c’était important pour moi. Je ne voulais pas me sentir seul face à ça.

 

Rapidement, j’ai dépassé ce tabou lié à l’organe. Pour moi, c’est un cancer comme un autre, et j’ai choisi de ne pas en faire un tabou. Je fais parfois l’effort d’en parler dans mes stories parce que, si je suis parvenu à diagnostiquer mon cancer à temps, c’est grâce à une publication que j’avais vue. J’avoue que j’ai souvent peur qu’on me perçoive comme quelqu’un qui cherche l’attention, mais je me rappelle pourquoi je le fais : c’est important. Si ça a pu m’aider, peut-être que cela pourra aussi aider d’autres personnes. Et rien que pour ça, je continue à partager, malgré mes doutes.

 

 

As-tu un conseil à donner aux jeunes hommes qui hésitent à s’auto-palper ou à consulter ?

 

Mon conseil est simple : il ne faut pas hésiter à s’autopalper. Je ne vois pas pourquoi on aurait peur ou qu’on ne voudrait pas le faire. Ça ne prend littéralement que 30 secondes, et ces 30 secondes peuvent te sauver la vie. C’est juste une petite habitude à adopter.

 

Le plus compliqué, en réalité, c’est de ne pas oublier. On est souvent pris par le quotidien et ça nous sort de l’esprit. C’est pourquoi il est essentiel d’en parler, que ce soit dans des conversations ou sur les réseaux sociaux, pour sensibiliser et rappeler l’importance de ce geste. Et surtout, au moindre doute, il faut consulter un médecin. Ne serait-ce que pour lever l’incertitude et éviter de rester avec cette angoisse. Mieux vaut être rassuré pour rien qu’ignorer un problème qui pourrait s’aggraver.

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